Comité éditorial: Martin Gallié, Anthony Desbiens, Félix Beauchemin, Elsa Galerand et Yanick Noiseux.
Ce nouveau projet du GIREPS, lancé au printemps 2024 et intitulé lesChroniques des conflits du travail, s’inscrit dans le cadre de son chantier sur les formes et stratégies organisationnelles de l’action collective. Il vise à éclairer le débat public sur les enjeux du monde du travail et à promouvoir une meilleure compréhension des réalités auxquelles sont confrontés les travailleurs et travailleuses au Québec, comme ailleurs.
Les Chroniques de conflits du travail sont nées d’un constat partagé : les transformations du travail, de son organisation et des modalités de son exploitation sont au cœur de nombreuses luttes sociales, aujourd’hui comme hier. Pourtant, ces conflits sont encore trop souvent mal connus et sous documentés. Trop rarement médiatisées, les revendications des travailleurs et travailleuses en lutte sont aussi peu relayées. Les enjeux autour desquels ils et elles se mobilisent, les conditions de leurs mobilisations collectives, les pratiques concrètes de résistance qu’ils et elles déploient contre l’exploitation sont également peu étudiées. Ainsi en est-il des coups portés à l’encontre des acquis des luttes passées en matière de droits du travail (salaires, temps de travail, protection sociale, santé et sécurité, rapports collectifs). Lock out, recours au travail de remplacement, recours au travail non libre de travailleurs et travailleuses migrant·es, intimidations, sanctions disciplinaires, négociations de mauvaise foi, injonctions, rythment ainsi les conflits du travail et participent à en déterminer les issues.
Ce sont ces dynamiques que nous voudrions contribuer à documenter avec ces Chroniques des conflits du travail.
Le comité de rédaction est composé de trois membres professeur·e·s – Martin Gallié, Yanick Noiseux et Elsa Galerand et deux membres étudiants (Anthony Desbiens, Félix Beauchemin) du GIREPS. Il est responsable d’examiner les propositions, d’assurer le suivi avec les auteur·e·s de chaque chronique, et d’assurer le travail d’édition, de publication et de mise à jour.
La grève des travailleurs de la Société québécoise du cannabis (SQDC) s’est démarquée comme l’une des plus longues de ces dernières années au Québec. Étalée sur une période de 17 mois, environ 300 travailleurs et travailleuses affilié·e·s à la FTQ ont maintenu une pression constante en organisant des piquets devant les succursales. Leurs revendications étaient claires : une augmentation de salaire et une amélioration des conditions de travail.
Pendant toute la durée du conflit, la SQDC a adopté une stratégie de confrontation en tentant de diviser les syndiqué·e·s, en rejetant leurs revendications et en recourant à des mesures répressives telles que la suspension de dizaines de travailleurs et travailleuses ayant refusé de porter l’uniforme réglementaire. De plus, l’entreprise a eu recours à des briseurs de grève et a multiplié les procédures judiciaires pour affaiblir le mouvement de grève.
Cette grève de la SQDC illustre les défis auxquels sont confrontés les travailleurs et travailleuses du secteur de la vente de cannabis au Québec, mettant en lumière les questions cruciales de rémunération, de conditions de travail et de respect des droits syndicaux.
En avril 2021, les 1050 employé·e·s de l’usine d’abattage de porcs d’Olymel à Vallée-Jonction, en Beauce, déclarent la grève illimitée. Cette grève, qui durera plus de quatre mois, a mis à l’avant-plan bon nombre d’enjeux qui débordent de ce secteur d’activité: précarisation de l’emploi, stratégies antisyndicales, désindustrialisation, réalités du travail en région et en milieu rural. Dans un contexte d’érosion du syndicalisme dans le secteur privé et d’individualisation du rapport au travail, le cas « Olymel » permet de dépeindre l’expérience d’un conflit de travail récent impliquant des salarié·e·s à temps plein en « usine » – norme typique du régime fordiste –, autant dans ses gains que dans ses inévitables difficultés.
Cette chronique est consacrée à la grève des 65 500 enseignantes (du préscolaire, du primaire, du secondaire, de l’enseignement en milieu carcéral, de la formation professionnelle et de l’éducation des adultes) syndiquées à la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) qui a été déclenchée le 23 novembre 2023 avec un mandat de grève illimitée et qui a pris fin après cinq semaines.
En guise d’introduction, cette chronique revient d’abord sur le contexte de cette grève, la dynamique syndicale dans laquelle elle s’inscrit ainsi que sur les revendications (partie 1). Elle présente ensuite une chronologie détaillée des évènements qui veut rendre compte des paradoxes du conflit et de quelques-uns des enjeux qu’il soulève (partie 2). En conclusion, elle propose quelques pistes de réflexion (partie 3). L’ensemble a été exclusivement rédigé à partir des articles de presse, communiqués syndicaux, chroniques, synthèses ou commentaires repérés sur les pages Facebook (de la FAE, des syndicats membres de la FAE et du Front commun) qui ont été publiés, et ce jusqu’à trois mois après la signature de l’entente mettant fin à la grève.
Le 15 septembre 2022, la Société des arrimeurs de Québec (SAQ) déclenche un lock out à l’encontre des 81 débardeurs du Port de Québec. En septembre 2024, deux ans plus tard, le lock out est toujours en vigueur et les activités du Port de Québec semblent fonctionner « normalement ». Elles seraient même en légère hausse. Il faut dire que dans la mesure où les ports relèvent de la compétence fédérale, la SAQ peut légalement recourir à des briseurs de grève.
Les 30 syndicats impliqués dans le secteur de l’hôtellerie mènent une plateforme commune de revendications pour négocier avec leurs employeurs, tout en conservant la liberté d’ajouter des demandes spécifiques et de choisir leurs moyens d’action. Sans convention collective depuis le 30 juin 2024, plusieurs grèves ponctuelles ont eu lieu durant l’été.
Le 12 septembre, les employés de l’hôtel Bonaventure à Montréal ont entamé une grève illimitée, suivis le lendemain par ceux de l’hôtel PUR à Québec. Les travailleurs de l’hôtel Delta à Sherbrooke, quant à eux, ont adopté une banque de 120 heures de grève.
La présente chronique vise à faire un bref survol de cette lutte syndicale.
Cette chronique présente une chronologie de la grève illimitée menée par la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) de novembre à décembre 2023. Cette mobilisation visait à dénoncer l’inaction du gouvernement face aux revendications concernant les conditions de travail, la composition des classes et les salaires des enseignants. Malgré des tentatives de négociation, le gouvernement n’a proposé que des concessions insuffisantes, menant à une grève historique impliquant 65 500 enseignant·e·s. La mobilisation a culminé le 23 novembre 2023, date marquée par une manifestation massive et un soutien important du public. Après cinq semaines de grève, une entente de principe a finalement été conclue, bien que celle-ci ait suscité des réactions mitigées parmi les membres, en raison de compromis perçus comme insuffisants face aux attentes initiales.