
Auteur(s)
Laurence Hamel-Roy, Mylène Fauvel, Corynne Laurence-Ruel, Yanick Noiseux
Résumé
Au printemps 2020, en contrepoint de ce qui a été appelé le « Grand confinement »,
des milliers de travailleur·euses·s ont continué à travailler quotidiennement à l’extérieur de
leur domicile, s’exposant au risque de contracter la COVID-19, faisant souvent face à une
hausse de leur charge de travail et devant composer avec les défis de conciliation travailfamille-études. Qualifié·e·s d’« essentiels », ces travailleur·euse·s et leurs emplois ont été au cœur de l’action publique ; ils et elles incarnent la tension entre la nécessité de répondre aux besoins vitaux de la population et celle de préserver du système économique capitaliste qui fut mise à l’épreuve par la pandémie.
S’inscrivant dans le prolongement des réflexions sur le rôle de l’État dans la
structuration des marchés du travail, ce rapport présente et analyse de manière croisée
quatre études de cas portant sur des secteurs d’emploi qui furent particulièrement concernés
par les enjeux de l’action publique dans le cadre de la première vague de la pandémie de
COVID-19 : 1) le secteur des centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD),
2) les organismes d’action communautaire autonome, 3) l’exploitation maraichère et 4)
l’industrie de la construction.
Ce rapport met en lumière le paradoxe d’un « Grand confinement » marqué, pour bon
nombre de travailleur·euse·s au Québec, non pas par une « mise sur pause », mais plutôt par
une injonction forte au travail soutenue par des mécanismes d’activation et d’incitation
méthodiquement construits par l’intervention gouvernementale provinciale et fédérale.
Impliquant des dispositifs qui, dans un double mouvement, incitent et contraignent la mobilité des travailleur·euse·s sur le marché du travail suivant des modalités de précarisation se déployant à l’intersection de rapports de genre, de race et de classe, ces interventions ont
contribué au prolongement des divisions du travail et de leurs modalités d’exploitation, et ce,
au sein même des « travailleur·euse·s essentiel·le·s ».