Le « Grand confinement » et l’action publique durant la première vague de la COVID-19 au Québec : Regards sur les rapports de genre, de race et de classe dans quatre secteurs d’emploi

Au printemps 2020, en contrepoint de ce qui a été appelé le « Grand confinement », des milliers de travailleur·euses·s ont continué à travailler quotidiennement à l’extérieur de leur domicile, s’exposant au risque de contracter la COVID-19, faisant souvent face à une hausse de leur charge de travail et devant composer avec les défis de conciliation travailfamille-études. Qualifié·e·s d’« essentiels », ces travailleur·euse·s et leurs emplois ont été au cœur de l’action publique ; ils et elles incarnent la tension entre la nécessité de répondre aux besoins vitaux de la population et celle de préserver du système économique capitaliste qui fut mise à l’épreuve par la pandémie. S’inscrivant dans le prolongement des réflexions sur le rôle de l’État dans la structuration des marchés du travail, ce rapport présente et analyse de manière croisée quatre études de cas portant sur des secteurs d’emploi qui furent particulièrement concernés par les enjeux de l’action publique dans le cadre de la première vague de la pandémie de COVID-19 : 1) le secteur des centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD), 2) les organismes d’action communautaire autonome, 3) l’exploitation maraichère et 4) l’industrie de la construction. Ce rapport met en lumière le paradoxe d’un « Grand confinement » marqué, pour bon nombre de travailleur·euse·s au Québec, non pas par une « mise sur pause », mais plutôt par une injonction forte au travail soutenue par des mécanismes d’activation et d’incitation méthodiquement construits par l’intervention gouvernementale provinciale et fédérale. Impliquant des dispositifs qui, dans un double mouvement, incitent et contraignent la mobilité des travailleur·euse·s sur le marché du travail suivant des modalités de précarisation se déployant à l’intersection de rapports de genre, de race et de classe, ces interventions ont contribué au prolongement des divisions du travail et de leurs modalités d’exploitation, et ce, au sein même des « travailleur·euse·s essentiel·le·s ».    

Cahiers du GIREPS, Rapport de recherche

Laurence Hamel-Roy, Mylène Fauvel, Corynne Laurence-Ruel, Yanick Noiseux