Syndicalisme et travail atypique : l’évolution des prises de position des grandes centrales québécoises

En parcourant l’historique des revendications, des orientations et des prises de position des grandes centrales québécoises au cours des trente dernières années, force est de constater que celles-ci se sont d’abord cantonnées dans une position défensive visant à contrer la progression du travail atypique. Longtemps à la remorque d’autres organisations de la société civile lorsqu’il s’est agi de défendre aussi les intérêts des travailleurs s’exerçant sur les marchés périphériques du travail, les centrales ont lentement pris acte des transformations fondamentales des marchés du travail et de l’obligation d’agir « malgré et avec » les changements. Au tournant du millénaire, les centrales se sont progressivement tournées vers des stratégies plus variées cherchant à prendre en compte les besoins différenciés des travailleurs atypiques. Plutôt que de simplement combattre la prolifération de l’emploi atypique, les centrales syndicales insistent désormais sur l’amélioration des situations dans lesquelles se retrouvent ces travailleurs. Le principe général d’égalité de traitement affirmant qu’à travail égal il faut un salaire égal sera progressivement reformulé de manière à répondre aux nouvelles formes que prend l’emploi. Des efforts significatifs ont été faits afin de recruter de nouveaux membres parmi les travailleurs atypiques, notamment dans le secteur tertiaire privé où abonde l’emploi à temps partiel ainsi qu’auprès de travailleurs temporaires. Contrairement aux idées reçues, les centrales se sont aussi mobilisées afin d’organiser collectivement de nombreux groupes de travailleurs autonomes. Le fait que les grandes centrales syndicales du Québec se soient finalement prononcées pour l’interdiction totale des clauses de disparité de traitement en fonction du statut d’emploi constitue également une avancée importante. Cela dit, la persistance de ces clauses « orphelin » a un impact considérable sur la capacité du syndicalisme à affirmer sa raison d’être et apparaît aujourd’hui comme un enjeu majeur, notamment pour les nouvelles générations de travailleurs. Noiseux, Yanick. « Syndicalisme et travail atypique : l’évolution des prises de position des grandes centrales québécoises », Revue multidisciplinaire sur l’emploi, le syndicalisme et le travail (REMEST), vol. 8, no. 2, 2013, p. 84-100.

Articles scientifiques

Yanick Noiseux

Note sociopolitique no. 2 : Le travail au Québec : plus flexible et plus précaire

Dans le champ du travail, le passage à un régime néolibéral au tournant des années 1980 renvoie à un mot : la flexibilisation. Ce virage s’est traduit par une série de ruptures avec le régime précédent, appelé « compromis fordiste », sorte de pacte social entre l’État, les employeurs et les travailleurs et travailleuses visant à encadrer le marché du travail. La centrifugation de l’emploi vers les marchés périphériques du travail (Durand, 2004), la fragmentation et la segmentation des marchés du travail et ainsi que la montée rapide du nombre d’emplois atypiques représentent des traits marquants du nouveau modèle. Désormais, dans la nouvelle donne, comme le souligne Desrochers, « flexibilité et précarité sont deux facettes d’une même réalité » (2000 : 17). Cette fiche se veut l’occasion de revenir sur cette grande transformation du travail en insistant sur le rôle de l’État, sur l’essor du travail atypique et sa précarisation, ainsi que sur les enjeux que ces changements posent pour le renouvèlement de l’action syndicale. Noiseux, Yanick, Samuel Blouin et Groupe interuniversitaire et interdisciplinaire de recherche sur l’emploi, la pauvreté et la protection sociale [GIREPS], Le travail au Québec : plus flexible et plus précaire, GIREPS, Québec, avril 2013, 4p.

Notes sociopolitiques

Yanick Noiseux, Samuel Blouin